vendredi 21 octobre 2011

Tous seuls ensemble. (15 juin 2010)

Des fois je me demande si notre besoin de se garocher autant vers les autres ne découle pas de notre besoin de fuir les questionnements que nous impose notre propre solitude.  Vous savez ce lot de questions bien enfouies dans notre caboche qui ressortent inévitablement dans nos moments de doute, de tristesse ou de bonheur souvent trop grand que nous ne croyons pas qu'il est possible que nous soyons en train de le vivre.

Je suis de ce lot.  Je suis de ces fugueurs de solitude.  Autant je peux passer des heures à me questionner et à faire face à l'individu seul que je suis, autant je peux tout faire pour meubler le silence solitaire qui m'entoure afin de repousser le plus possible le moment où je me retrouverai face à moi-même.  J'ai souvent le discours contraire, je prône à qui veut bien l'entendre que la solitude apporte des réponses.  C'est le cas!  Combien de nuits ai-je passé à rechercher une réponse à certaines de mes inquiétudes ou à faire un choix que j'allais pleinement assumé.  Toutefois, ces décisions que l'on prend seul, nous sommes souvent les seuls à en comprendre la logique.

Je pense à mon amie qui est partie à New York pour l'été afin de poursuivre un projet personnel loin de chez elle, emportant avec elle ses ambitions et ses questionnements.  Je trouve si courageux de partir ainsi n'ayant que soi comme ressource en cas de crise de questionnement.  Je doute que je sois capable d'en faire autant dans la vie, j'ai comme un trop plein dans mon esprit qui implique un besoin intrinsèque de le déverser sur les autres.  Des fois, je ressens que j'ai besoin de tout dire ce qui me passe par la tête, toutes les petites folies qui transitent par ma caboche afin de les justifier en quelques sortes.  On dirait que le simple fait de le mentionner permet de justifier leur raison d'être.  Mais comment pourrais-je effectuer ce déversement tout en étant seul avec mes pensées?

Rilke disait que la seule chose qui était nécessaire était la solitude, la grande solitude intérieure.  Que d'aller en soi-même et de n'y rencontrer personne pendant des heures était ce qu'il fallait parvenir à atteindre. (Lettre à un jeune poète)  Des fois, j'ai l'impression que de me retrouver seul en moi-même ne peut apporter que l'écho de nos questions récurrentes, comme si nous nous retrouvions dans la salle des miroirs de Versailles où nous sommes bombardés par l'écho et les reflets de nous-mêmes.  Cela peut être bon de s'y attarder quelques instants, mais y rester deviendrait aliénant.

Mais être seul n'est-il pas la résultante d'un choix dans le fond?  Le choix de ne pas faire de compromis.  Celui de s'être permis l'erreur?  Celui de ne pas avoir osé?  Et quand l'antidote à la solitude se pointe le bout du nez à l'horizon, quand un éventail de possibilités s'offre à nous, il devient encore une fois difficile de quitter notre solitude.  Un choix encore une fois.  Celui d'oser.  Celui de passer par-dessus ses erreurs.  Celui de faire un compromis.  Mais qu'en est-il vraiment de notre besoin de quitter notre solitude?  On y revient tout le temps.

Seul parce qu'on a tout pris, parce qu'on a eu tort.  C'est se croire en vie même quand on est mort.  C'est abandonner sa chance à un autre.  Sans jamais vouloir oublier sa faute.  Seul parce que l'amour a changé de camp. C'est des cris de peine, mais qui les entend?
(Félix Gray, Don Juan)
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