vendredi 21 octobre 2011

Pour une parcelle d'éternité. (25 mars 2010)

Hier, la mère de mon père est morte.  Proche de ses 80 ans et elle est partie sans que nous ne nous soyions jamais rencontrés.  Ni même tout simplement vu au travers de la vitre d'une voiture.  Elle est partie emportant avec elle un pan de mon histoire que je ne connais pas.  Car son histoire est aussi un peu mon histoire ou devrais-je plutôt dire que je sens que mon histoire découle un tant soit peu de la sienne.   

Hier, ce sont les racines de mon père qui sont mortes.  Je dis racine, mais je sens plutôt que ce sont ses semences qui sont disparues puisque j'ai l'impression qu'il y a bien longtemps que mon père a planté ses racines dans un terreau bien plus verdoyant.  Mais comment renier la matrice, celle qui génère sans nécessairement entretenir?  J'ai vu hier pour la première fois dans les yeux de mon père que c'était impossible, que malgré les pires tempêtes, il y aurait toujours l'espoir enfoui du jeune fils qu'il était souhaitant fort fort le retour d'une quiétude face au passé.  L'obtient-on vraiment?  Peut-elle réellement reprendre une place sans trop laisser de marques de son passage?

Hier, c'est aussi une famille qui est morte.  Ce minuscule lien d'une fragilité sans nom qui unissait tous ces gens est pour moi disparu.  Le "Happy Ending" n'aura finalement pas lieu.  Il y a eu coupure au montage faut croire.  Et ce lien?  Qu'a-t-il déjà été au fait?  Un lien de sang? Un vulgaire potentiel de rein?  Il ne s'agissait que d'une histoire écrite d'encre de sable sur une plage lors d'une journée de grands vents.  Un autre rendez-vous manqué sur la longue liste de la vie. Il fallait sûrement y être, là oû je ne sais pas, au bon jour et au bon moment.  Mais nous n'y étions pas.  Je n'y étais pas.

Hier est morte également ma rancoeur face à cette femme que je rendais souvent responsable de la fragilité de la valeur familiale dans ma vie.  Avec elle sont partis le doute et la tristesse.  Je ne pense toutefois pas qu'elle nous laisse dans le deuil, mais plutôt dans l'espoir d'une fin meilleure.  Je pense à mon père qui pour la première fois pourra enfin s'autoriser à se sentir orphelin pour de vrai, sans que sa raison lui rappelle qu'il ne l'était pas vraiment.  

Et cela m'amène à penser à cette quatrième grand-mère qui existe quelque part et que je ne connais pas davantage.  Je ne sais tout simplement pas si elle vit toujours.  Je ne sais pas si nous avons  pu exister au creux des coeurs de ces femmes qui ont laissés les leurs pour le mieux.  Pensent-elles des fois avoir pu faire des erreurs? Ont-elles déjà moindrement pensé à la simple possibilité de notre existence à mon frère et moi?  J'ose croire que nous ne le saurons jamais.

http://www.journalexpress.ca/article-443588-DUFRESNE-MARIE-THERESE-19302010.html


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